Notre-Dame de la Joie

La chapelle Notre-Dame de la Joie, à Penmarc’h, Finistère Sud, a inspiré des dizaines d’artistes, d’Alo à Robert Yan, en passant par Henri Barnoin, Charles Cottet, Lucien-Victor Delpy, Geo-Fourrier, Jean-Julien Lemordant, Mathurin Méheut, Lucien Simon, … Impossible de tous les citer !

La chapelle
André Dauchez a lui aussi posé son chevalet devant cette chapelle. Mais si les peintres ont, le plus souvent, représenté des scènes animées – brûlage du goémon, Pardons et foires – aux alentours de la chapelle, Dauchez s’est attaché à représenter la chapelle elle-même, dressée face à la mer, à traduire son caractère insolite et la sauvagerie du site, au sud de la baie d’Audierne.

Sa première peinture de la chapelle date de 1922, Notre-Dame de la Joie. Elle traduit l’émotion qu’a dû ressentir l’artiste devant cet édifice majestueux, construit tout au bord de l’eau, les vagues venant mourir à ses pieds. Plutôt que de la voir comme décor de fond d’une scène animée, elle est un motif à part entière, et seuls quelques détails évoquent la vie : une Bigoudène à droite du calvaire, devant l’entrée de la chapelle ; des bateaux sur la ligne d’horizon ; quelques mouettes autour du clocher (ces détails ne figurent pas sur l’étude).
Dressée face à la mer… Les nuages venus de l’Atlantique s’amoncellent à l’approche de la côte, créant cette lumière si particulière au pays bigouden.

La toile (97×146) est exposée au Salon de la Société Nationale des Beaux-Arts.
« M. André Dauchez, qui a peint aussi cette émouvante Notre-Dame de la Joie si robustement ancrée et si aérienne pourtant. » 13 avril 1922, J. Valmy-Baisse, 13 avril 1922, Comoedia
« Dauchez, qui ne veut rien savoir de l’homme, du Breton et laisse, comme dans Notre-Dame de la Joie, parler la langue éloquente des vieilles pierres. » Léon Plée, 16 avril 1922, Les Annales politiques et littéraires

André Dauchez reprend ce motif dans ce qu’il appelle un « dessin teinté » (97×146 lui aussi), un style plus personnel qu’il affectionne et pratique depuis plus de vingt ans. Le dessin teinté est aussi une huile, mais tous les contours sont nettement marqués : on connaît son goût pour les livres illustrés, il s’inspire ici des techniques d’illustration.


Dauchez est aussi graveur : ce motif est repris dans une eau-forte en 1929, tirée à 35 épreuves dans son état définitif.


En 1923, Dauchez nous propose une nouvelle représentation de Notre-Dame de la Joie, intitulée Église de la Joie, vue cette fois du sud-est, de la mer. Là encore, la chapelle est le sujet unique du tableau, on est frappé par le pignon aveugle sous le clocher, face à la mer, entouré de deux tourelles, l’une octogonale, l’autre cylindrique ; elles abritent les escaliers qui mènent au clocher. Quelques plates échouées, quelques Bigoudènes évoquent encore la proximité des hommes. L’esquisse (46×54 cm) est achetée par le musée de Saint-Étienne en 1935 au Salon des Arts du Forez.

Construite à la fin du XVe siècle, Notre-Dame de la Joie est vénérée par les marins : elle est un amer pour les navigateurs, un lieu d’hommage et de reconnaissance pour les marins épargnés par les tempêtes, un lieu de recueillement pour les veuves de marins péris en mer. Elle est un haut lieu de pèlerinage, un lieu emblématique du pays bigouden, classée monument historique en 1916.

Le calvaire
Son calvaire, érigé en 1588, est dédié à Notre-Dame de la Pitié. Il se compose, de bas en haut, de quatre marches, une pietà, une Vierge à l’Enfant entourée de deux apôtres, et le Christ en croix au sommet du fût de cinq mètres.

Le détail du tableau nous montre le calvaire vu de l’est, alors que la photo nous le montre de l’ouest. Sur cette photo, nous remarquons la présence de nombreuses Bigoudènes et quelques baraquements en arrière-plan : elle a vraisemblablement été réalisée lors d’un Pardon.

Le Pardon
Le Pardon de Notre-Dame de la Joie a lieu chaque année le 15 août, fête de l’Assomption. Il débute traditionnellement par la bénédiction de la mer, suivie d’une procession derrière de nombreuses bannières des paroisses voisines, et se termine par une messe. André Dauchez n’a pas représenté le Pardon en tant que peintre-graveur, mais s’y est intéressé en tant que photographe : il y a réalisé de nombreux clichés.


Les photos d’André Dauchez ne sont malheureusement pas datées, celles-ci ont probablement été prises au tout début des années 1900 (les coiffes bigoudènes n’ont pas encore commencé à prendre de la hauteur). Le Pardon était alors principalement une fête religieuse, mais aussi l’occasion de se retrouver en famille et entre amis au repas en plein air qui suivait la messe. Des activités profanes s’ajouteront dans les années 1920 : manèges, cirques forains. De nos jours, le Pardon a encore lieu chaque année le 15 août. La chapelle, toujours emblématique du pays bigouden, ainsi que le calvaire, ont été restaurés à plusieurs reprises. Une digue protège aujourd’hui la chapelle des assauts de la mer : André Dauchez ne ferait plus tout à fait les mêmes peintures un siècle plus tard.
En tant que peintre et graveur paysagiste – qui a très rarement représenté des scènes animées –, il nous a montré la beauté du site et de la chapelle ; en tant que photographe, il nous montre de telles scènes : à Notre-Dame de la Joie un Pardon, et ailleurs d’autres fêtes populaires, des goémoniers, des pêcheurs, des lavandières, des paysans…

Crédits photos :
– Photos en noir et blanc : André Dauchez
– Lucien Simon, Les brûleurs de goémon : Musée des Beaux-Arts de Quimper
– Esquisse Église de la Joie : Notre-Dame de la Joie – Pointe de Penmarc’h, 1923. Musée d’art moderne et contemporain de Saint-Étienne Métropole, Inv. 43.4.119, Droits Cyrille Cauvet / MAMC Saint-Étienne Métropole

Une réponse à “Notre-Dame de la Joie”

  1. Merci Jacques pour ce sujet sur Nôtre Dame de la Joie

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